La santé en Pays de Ploërmel,  Pour les adhérents

L’hôpital et la marchandisation du vivant : pourquoi la crise hospitalière est systémique ?

On le sait, la marchandisation du vivant sévit depuis longtemps en Bretagne et partout ailleurs, dans les élevages industriels, sans reconnaissance ni respect pour la souffrance animale. Les animaux y sont considérés comme des marchandises, devant rapporter le plus possible et le plus vite possible à leurs exploitants, par la rationalisation et la vente de leur productions (lait, et chair animale autrement appelée : « viande »). Seul le critère quantitatif prévaut. Pour cela, tous les moyens sont bons. Les agriculteurs y sont conditionnés et maintenus dans leur dépendance croissante par et pour l’agro business et les banques. Les plus faibles d’entre eux sont poussés au suicide.

Quel rapport avec l’hôpital ?

Le parallèle peut être choquant pour certains. Pourtant, le système de santé actuel, centré sur l’efficacité économique, aboutit à dénier aux usagers la qualité de sujets, à augmenter la souffrance, et la dépendance des soignants au système mis en place. Il amène progressivement les hôpitaux publics, services d’urgences, E.H.P.A.D. maltraités à devenir eux mêmes maltraitants. Un comble et un contresens complet par rapport à leurs missions.

Nos corps deviennent pour les « managers » des objets à soigner, et à déplacer d’un lieu de soin à l’autre. Ces « managers », bien payés pour faire des économies, nous semblent dépourvus d’émotions et d’empathie par rapport aux soignants et aux usagers/ »patients » qui s’accumulent sur des brancards dans les couloirs en attendant des soins et une chambre. Les lits et les postes continuent à être supprimés partout dans les services publics de santé. Les conditions de travail sont tellement dégradées que les personnels soignants se retrouvent contraints à démissionner pour maintenir leur équilibre et leur santé, et que les jeunes soignants ne veulent plus y venir travailler.

La bureaucratie, le pouvoir bureaucratique augmentent, le nombre, le pouvoir, l’autonomie des soignants ne cesse de diminuer. Quant aux usagers, l’absence de leur écoute et de leurs prises de parole les réduit au rôle de « potiches » dans les instances décisionnaires.

Quant à nos maladies, elles deviennent des marchés pour l’industrie pharmaceutique, pour les laboratoires, et les fabricants de matériels médicaux spécialisés. Ceci sans considération pour nos souffrances. Et sans s’attaquer aux causes de ces maladies dites « de civilisation ». Elles permettent d’augmenter le Produit Intérieur Brut. Ce sont les laboratoires qui fixent les prix, ainsi que leurs marges bénéficiaires, ceci dans l’intérêt premier de leurs actionnaires. Les vaccins en sont l’exemple le plus récent. Les autorités de Santé ne remettent pas cela en cause, dans leurs recherches d’économies à réaliser sur le dos des soignants et des patients. En revanche, elles considèrent les frais de personnel comme un charge compressible, réductible, en alourdissant de plus en plus la charge de travail des soignants, et en remplaçant le moins possible les départs.

Nos corps sont alors déplacés avec leurs maladies et leurs souffrances d’un lieu de soin spécialisé à un autre, dans le G.H.T., en fonction non de l’intérêt de leur propriétaire, mais de la rationalité gestionnaire.

Si on continue comme ça, de moins en moins de sous seront disponibles pour notre santé en équipement public, et de plus en plus de sous pour le secteur privé, et de moins de soins seront accessibles pour les plus pauvres.

Il s’agit bien d’un problème systémique, à resituer dans le cadre du système global de la société actuelle. A savoir l’économie capitaliste mondialisée.

Dans ce modèle, il y a de moins en moins de sous pour la santé, la justice, l’éducation, la culture, et de plus en plus de sous pour les entreprises industrielles irresponsables, polluantes et destructrices, pour les banques privées, et surtout pour leurs « actionnaires » qui, contrairement au sens commun du terme, eux, ne font rien. Les fameux « détenteurs de capitaux » anonymes, qui s’enrichissent toujours plus quand les peuples s’appauvrissent, et qui alimentent l’hyper production et l’hyper consommation, l’hyper gaspillage, dans nos hypermarchés, pour leur seul profit. Ce sont leurs décisions, prises dans le secret des conseils d’administration, pour majorer leurs profits, qui nous oppriment tous. Ce système génère les maladies de civilisation comme le cancer, les maladies cardio vasculaires, ayant des causes multiples, dont principalement l’augmentation du stress, la pollution de l’air que nous respirons, les traitements chimiques de l’eau que nous buvons, et notre alimentation gorgée de pesticides, etc. Le système actuel est la cause principale des déséquilibres à tous niveaux, et préjudiciable en particulier pour notre santé. Physique et mentale.

Ses choix délétères sont soutenus aujourd’hui par la majorité de nos hommes et femmes politiques, à la merci des lobbies des dites industries.

La plupart des soignants, confrontés aux errements humains de ce système qui les oppressent, continuent à croire malgré tout à la dimension humaine et sociale de leur métier. Un métier qu’ils ont choisi, et il veulent y respecter encore leurs engagements, tels que définis dans le serment d’Hippocrate, qu’ils ont signés. Est ce encore possible, quand la plupart d’entre eux sont pris dans des contradictions insolubles entre leur éthique de soignants, et la pression du temps, l’exhortation à la rentabilité qu’ils subissent ?. Il est permis d’en douter. Cela les met en souffrance, eux et elles qui sont censés réduire celles de leurs patients ?

Hélas, les humains étant ce qu’ils sont, parfois certain(e)s médecins spécialisés, chirurgiens, heureusement minoritaires, ont parfois tendance à faire passer le remplissage de leurs agendas et de leurs comptes en banque avant l’intérêt réel des patients.. Ceux là peuvent s’accommoder du nouveau système mis en place. Nos fonctions et organes à réparer ont alors pour eux une valeur économique, plus ou moins élevée selon la nature et la durée de leur intervention. Cela dit, il est inutile et dangereux de chercher des boucs émissaires…L’avidité, l’esprit de lucre, nous guettent tous au coin du bois, et donc aussi parfois au coin des hôpitaux, publics et privés.

Toutes ces déviations des buts initiaux des hôpitaux sont le résultat d’un système économique et social dont les valeurs premières ne sont pas l’humain, le respect du vivant sous toutes ses formes, mais la compétition, et le profit financier, toujours pour les plus riches, et soutenu par eux qui détiennent la majorité des pouvoirs.

A nous, citoyens, de reprendre ensemble notre part de pouvoir, individuel et collectif. Comment ? Cela reste à inventer ensemble.

Il importe donc de refonder complètement notre modèle de santé sur ces bases humaines. Cela sera t il possible, sans refonder aussi le système socio économique tout entier sur la base de ces valeurs ? C’est peu probable. Pourtant des décisions politiques adaptées pourraient opérer progressivement les changements radicaux nécessaires. Une large pression citoyenne et la mise en œuvre de lieux d’intelligence collective au plus près des usagers est indispensable pour y parvenir. Mais non suffisante. Cette mobilisation autour des Biens Communs est transversale aux différentes tendances politique. Quand la maison brûle, et que les détenteurs des pouvoirs à tout niveaux restent au mieux impuissants, manipulés, ou continuent à soutenir ce système, y trouvant leurs intérêts, il n’est plus temps de confronter nos visions du monde, mais d’en rechercher les bases communes pour agir au plus vite.

François Fagnot

2 commentaires

  • Danièle Civel

    Je trouve le commentaire de Jean Christophe sévère ou inadapté à la situation locale de notre bien commun qu’est la sur-VIE du vivant. Quand la maison brûle il faut l’arroser furieusement et non frileuse ment. Donc personnellement je soutiens l’article de François.
    Danièle

  • Jean-Christophe S.

    Bonjour François. Merci pour ce texte mais je trouve qu’il généralise un peu vite à certains endroits : tous « les hôpitaux publics, services d’urgences, E.H.P.A.D. » sont-ils conduits à « devenir maltraitants » ? Tous les « managers » sont-ils « dépourvus d’émotions » ? Toutes les « entreprises industrielles » sont-elles « irresponsables, polluantes et destructrices » ?… Le texte signifie-t-il que les lieux de soins accordent aussi peu de valeur à la vie humaine que les élevages industriels à la vie animale ? J’espère que non, car ça me choquerait.
    Je trouverais utile de développer dans d’autres articles des exemples concrets et des témoignages vécus qui illustrent ces propos, et aussi des exemples locaux de « pression citoyenne et mise en œuvre de lieux d’intelligence collective au plus près des usagers » car il y a dans le Pays de Ploërmel des initiatives citoyennes importantes (défense de l’hôpital de Ploërmel, événements culturels, mobilisations écologiques…), dont ce site pourrait se faire davantage l’écho afin d’accroître ces mobilisations. C’est aussi de voir ce qui bouge dans le bon sens qui donne espoir et envie de rejoindre des combats collectifs
    Amitiés,
    Jean-Christophe S.

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